Chimie, archéologie et paléontologie : un milligramme d’os suffit !

Résultats scientifiques Chimie Ecologie évolutive, environnement et biodiversité

Faire parler un milligramme de matière pour identifier l’animal correspondant à des fragments d’os issus de fouilles archéologiques : c’est le défi relevé par des scientifiques du CNRS. Dans une étude parue dans la revue Analytical Chemistry, ils dévoilent leur méthode qu’ils ont appliquée avec succès sur le site paléolithique de Caours en France. Une étude issue d'une collaboration entre le laboratoire Miniaturisation pour la Synthèse, l'Analyse et la Protéomique (MSAP)1 et le laboratoire Evolution, écologie et paléontologie (EEP)2 .

  • 1MSAP - ULille/CNRS
  • 2EEP - ULille/CNRS

Les fouilles archéologiques livrent de multiples fragments d’os non identifiables. L’art de la chimie analytique appliquée à l’archéologie est de faire parler ces échantillons. Au cours des dernières décennies, le séquençage de l'ADN contenu dans des fossiles et fragments d’os a permis d’identifier clairement sur certains sites archéologiques quelles espèces végétales et animales entouraient l’homme. Mais tous les échantillons ne contiennent pas d’ADN, et surtout lorsqu’ils sont très anciens.

En l’absence d’ADN ou de son séquençage, c’est aux protéines que les archéologues donnent la parole.  Bien plus robustes que l’ADN, des protéines très anciennes comme le collagène sont en effet protégées au cœur de l’os qui se fossilise avec le temps. La paléoprotéomique est cette nouvelle science qui étudie les protéines anciennes présentes dans des fossiles et ossements archéologiques pour en identifier l’espèce et le genre. Malheureusement, la quantité d’os requise pour l’analyse (de l’ordre de 10 à 100 milligrammes) est souvent trop élevée pour les fragments retrouvés et les conservateurs de musée bien frileux de laisser endommager les précieux vestiges de la préhistoire.

Mais récemment, des chimistes et paléontologues du CNRS ont démontré qu’il était possible d’obtenir d’excellents résultats à partir de prélèvements osseux d’à peine un milligramme. Cette avancée majeure a été possible grâce à l’utilisation de spectrométrie de masse haute résolution et l’optimisation de la préparation des échantillons. Des équipes du laboratoire Miniaturisation pour la Synthèse, l'Analyse et la Protéomique (CNRS/Université de Lille), du laboratoire Evolution, écologie et paléontologie (CNRS/Université de Lille) et du laboratoire de Géographie physique : environnements quaternaires et actuels (CNRS/Université Panthéon-Sorbonne/Université paris-Est Créteil Val-de-Marne) ont appliqué cette méthode à une centaine de fragments osseux provenant du site de Caours dans la Somme. Néandertal a vécu sur ce site il y a environ 123 000 ans, lors de l’optimum climatique de la dernière période interglaciaire. Pour chaque os, un milligramme de matière a été traité en plaque de 96 puits pour permettre une analyse haut débit. La poudre d'os déminéralisée a été lavée et digérée avec une enzyme pour récupérer les peptides. Une fois purifiés, ceux-ci ont été analysés sur une plateforme très performante de spectrométrie de masse de l’infrastructure de recherche Infranalytics.

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Une plaque de 96 puits contenant les échantillons à analyser obtenus à partir de fragments d’os fracturés et/ou brulés par les Néandertaliens de Caours (Somme) il y a 123 000 ans et non identifiables par leur ostéomorphologie. © Fabrice Bray

 

Contact

Fabrice Bray
Ingénieur de recherche au laboratoire Miniaturisation pour la Synthèse, l'Analyse et la Protéomique (CNRS/Université de Lille)
Christian Rolando
Chercheur au laboratoire Miniaturisation pour la synthèse, l'analyse et la protéomique (CNRS/Université de Lille)
Patrick Auguste
Chargé de Recherche