Un développement soutenable est-il encore possible ?

Médiation Scientifique Sciences humaines & sociales

FRESQUES comme FOUILLER - REFLECHIR -EXPLIQUER - SIMPLEMENT - QUESTIONNER - UTILEMENT - ECONOMIE- SOCIETES. FRESQUES : Un outil de sensibilisation par les podcasts qui propose d’apporter un éclairage grâce à la recherche scientifique sur les problématiques économiques et sociales du monde dans lequel nous vivons. Mieux comprendre notre place dans la société, les mécanismes des inégalités, les défis sociaux et économiques et de susciter efficacement des prises de conscience et des questionnements ….. , apporter un éclairage par une transmission de connaissances issues des recherches des chercheurs et enseignant-chercheurs du Centre lillois d'études et de recherches sociologiques et économiques (CLERSE1 ) et par leur expertise scientifique en sciences économiques et sociales.

  • 1CLERSE - ULille/CNRS

Entretien avec Bruno Boidin, économiste au Clersé UMR8019 à l’Université de Lille, spécialiste en économie de la santé aux Suds, en économie du développement et en économie du développement durable en Afrique. Il s’intéresse au concept « One Health » ou comment repenser en économie les relations « santé humaine - santé animale - environnement ». Dans cet épisode du podcast FRESQUES du Clersé, il nous éclaire sur le concept « One Health » que l’on peut traduire par « Une seule santé » et de son lien avec le développement soutenable. Bruno Boidin a publié de nombreux ouvrages et articles, on peut citer en particulier "Economie politique du développement durable" co-écrit avec Catherine Figuière et Arnaud Diemer (2018) chez De Boeck et « Insoutenabilités: une perspective en économie politique » qu’il a dirigé aux Presses universitaires du Septentrion (2024).

Après avoir donné une définition du développement soutenable et du concept « One Health », dont il explique également l’origine, Bruno Boidin nous éclaire sur le rôle de la science économique et de l’économie politique dans cette approche. Il apporte une compréhension de l’approche « One Health » et nous explique en quoi sa mise en œuvre est complexe et difficile à l’échelle internationale, face à une impossible gouvernance mondiale de la santé compte tenu des intérêts en présence. Ce concept serait-il toutefois l’une des clés pour revenir à une économie au service de l’humain, de sa santé et de la nature ? Comment faudrait-il procéder alors? Peut-on encore changer de modèle économique avant qu’il ne soit trop tard ? Le changement climatique, les crises sanitaires, économiques, sociales et environnementales nous questionnent sur la possibilité et l’urgence de penser des développements plus soutenables et surtout de passer à l’action. « Tout ou presque est lié : santé humaine, santé animale et environnement ».

Des solutions sont peut-être possibles avec notamment de nouvelles règles de fonctionnement démocratiques et de gestion des ressources, une articulation repensée entre le local et le global, la refonte des systèmes économiques, des investissements financiers, de la gouvernance et des relations de pouvoir. L’ensemble des transformations nécessaires pourraient contribuer à tendre vers un écodéveloppement (tel que présenté par Ignacy Sachs) dont la priorité serait sociale, respectant l’environnement, l’économie n’étant plus qu’un instrument au service de la société et de l’environnement.

Bruno Boidin, dans cet entretien et à travers des exemples puisés notamment en Afrique, nous invite à comprendre et à partager l’intérêt d’une approche en termes d’économie politique des insoutenabilités dont il nous explique les principes. « Dans un monde fini, pourquoi produire, que produire et pour qui produire ? ». C’est la question à laquelle l’ouvrage collectif sur les insoutenabilités (Boidin, dir., 2024) qu’il coordonne tente de répondre. Avec deux tendances contraires qui s’affrontent : d’un côté, la soutenabilité forte avec une perspective « One Health » véritablement mise en oeuvre, de l’autre, une dérive amplifiée vers les insoutenabilités inhérentes au productivisme et la concentration des richesses, aux lobbyings financiers, aux modes de gouvernance et de pouvoir non démocratiques … de quel côté la balance va-t-elle pencher face aux limites planétaires et à l’urgence des transitions ou des ruptures?

Les acteurs publics et privés ont un rôle important à jouer et une responsabilité considérable tout comme les citoyens dont les marges de manœuvre sont cependant contraintes par le système économique dominant. Du local au global et du global au local, des choix sont à faire afin de considérer l’économie autrement par une reconnexion des systèmes économiques et des humains à la nature.

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