Portrait de Science | 3 Questions à Anthony Treizebre

Portrait de Science Sciences de l'ingénierie et des systèmes

Anthony Trreizebre est maître de conférences à l'Université de Lille et chercheur au sein de l’Institut d’Électronique, de Microélectronique et de Nanotechnologie (IEMN1 ).

  • 1IEMN - CNRS/ULille/UPHF/Junia/CLI

Quel est votre parcours ?

Après avoir obtenu un baccalauréat technologique en électronique, rien ne me destinait à m’aventurer dans le monde de la recherche. Mon ambition initiale ? Devenir électronicien, réparer des télévisions, redonner vie à des machines à laver ! Porté par cette vision, j’ai décroché un BTS en électronique, mais mes enseignants m’ont encouragé à aller plus loin et animé par une curiosité grandissante, j’ai rejoint l’Université du Littoral Côte d’Opale à Calais pour y obtenir une licence en électronique. J'ai ensuite poursuivi une maîtrise EEA à l'Université de Lille 1, où j'ai découvert la micro-nanoélectronique, un domaine qui a transformé ma vie, notamment lors d'un stage à l'IEMN. Au sein de l’équipe MICFUT1 , j’ai travaillé sur un projet mêlant radiométrie micro-onde et applications biomédicales, à la frontière entre la physique et la biologie. Ce fut une révélation pour moi. Cette expérience m’a fait passer du rêve de réparer des machines à celui de tenter de réparer des vies. Dès lors, l’idée d’une thèse est devenue une évidence, mais la route n’a pas été simple. C’est le Pr Alain CAPPY, ancien directeur de l’IEMN, qui m’a donné l’opportunité d’entreprendre une thèse sans financement. Je lui en serai éternellement reconnaissant. Cette période difficile mais formatrice m’a permis de me plonger aux interfaces entre la physique, la biologie vers la clinique, un monde fascinant qui oriente mes recherches jour après jour.

Quel est votre principal sujet de recherche ?

Mon activité de recherche s’inscrit dans le domaine des modèles biomimétiques, et me permet de proposer des alternatives concrètes et innovantes aux modèles animaux (règle des 3R2 ). C’est une quête ambitieuse, mais essentielle, qui repose sur une approche interdisciplinaire sur le développement d’organes sur puce. Ces modèles ne sont pas seulement des avancées technologiques, ils soulèvent des questions sociétales majeures liées à l’expérimentation animale. Ces questions exigent que l’on repense la manière dont nous appréhendons les interactions entre la biologie humaine et les substances thérapeutiques. 

Mon objectif est clair : concevoir des modèles biomimétiques 3D capables de reproduire fidèlement les fonctions des organes humains. Les applications sont nombreuses : les maladies vasculaires, le diabète, les cancers, les incompatibilités médicamenteuses… Ce travail s’inscrit dans une dynamique structurante portée par des initiatives comme le PEPR3  MED-OOC et le CPER4  TecSanté (axe modélisation) qui partagent une ambition commune : fédérer les efforts autour des organes sur puce. Grâce au soutien de mon laboratoire, l’agrandissement de la plateforme de Bio Microfluidique nous positionne comme un acteur prêt à accueillir de nouvelles collaborations et à devenir un véritable centre névralgique. Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est cette dimension collective de la recherche. J’apporte « ma poussière à l’édifice » et ce n’est pas un effort solitaire : c’est une aventure humaine, marquée par des rencontres. Ensemble, nous co-construisons des solutions qui, je l’espère, contribueront à bâtir un avenir où technologie, biologie et éthique s’entrelacent au service de la santé humaine.

Equipe BioMEMS
Equipe BioMEMS

Quels impacts sociétaux peuvent connaître vos recherches ?

Pour moi, le retour vers la société est au coeur de toute démarche scientifique. Dans les problématiques cliniques, même si nous n’avons pas de contact direct avec les patients, ils restent au centre de nos préoccupations. Mais il ne suffit pas de faire de la science. Il est essentiel de partager nos avancées avec la société, de manière claire et transparente. Les travaux que nous réalisons ne sont pas de simples expériences déconnectées de la réalité. Pour que cette recherche soit comprise et soutenue, il est primordial d’impliquer le public, de lui expliquer nos enjeux, nos objectifs, et les applications potentielles à travers la médiation. Par exemple, les organes sur puce pourraient permettre l’accès à des traitements personnalisés en utilisant les propres cellules du patient. C’est un objectif ambitieux que je porte au travers de mes recherches et le CPER TecSanté, que j’ai l’honneur de co-diriger avec le Pr Nicolas Blanchemain depuis 2021.

En tant qu’enseignant-chercheur, je suis également convaincu que la formation joue un rôle clé. Préparer les générations futures pour relever ces défis, est une responsabilité que je prends à coeur. C’est dans cet esprit qu’en 2020, j’ai contribué à la création du master international « Life Sciences and Technologies ». Ce programme rassemble des étudiants issus de divers horizons – physiciens, biologistes, mathématiciens – pour les former à résoudre des problématiques biomédicales complexes en adoptant cette approche globale et collaborative. Je crois fermement que la recherche ne doit pas seulement produire des connaissances : elle doit aussi susciter l’espoir, faire avancer la société et préparer ceux qui la construiront demain. Cette vision, à la croisée de la science et l’engagement, est ce qui me guide chaque jour.

  • 1Aujourd’hui BioMEMS
  • 2Réduire / Raffiner / Remplacer
  • 3Programmes et Équipements Prioritaires de Recherche
  • 4Contrat de Plan État-Région

Mini-biographie

2007 : Obtention d’un doctorat en Micro-ondes et microtechnologies – Université de Lille
2008 : Maître de conférences à l'Université de Lille
2021-2027 : Co-porteur du CPER TecSanté
2024 : Membre du comité organisationnel du PEPR MED-OOC

Contact

Anthony Treizebre
Maître de conférences